Aux : Représentants permanents des États membres et observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies
Excellences,
Nous, organisations de la société civile et des droits humains soussignées, sommes alarmées par l’annonce faite le 15 février dernier par le vice-premier ministre éthiopien au Conseil exécutif de l’Union africaine (UA), selon laquelle le gouvernement éthiopien envisage de présenter une résolution lors de la prochaine session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies (ci-après « le Conseil »), dans le but de mettre fin au mandat de la Commission internationale d’experts en droits de l’homme sur l’Éthiopie (ICHREE, International Commission of Human Rights Experts on Ethiopia, ci-après « la Commission » ou « la Commission d’experts »).
Nous vous écrivons pour demander à vos délégations de rejeter toute résolution visant à mettre fin au mandat de la Commission de manière prématurée et d’exprimer votre soutien au mandat et au travail de cette Commission. Le mandat et le travail indépendant de la Commission d’experts sont essentiels pour préserver la possibilité pour les victimes de crimes internationaux graves d’avoir accès à la justice, en raison notamment de la dégradation de l’environnement dans lequel évoluent les médias indépendants et de l’affaiblissement du contrôle du respect des droits humains dans les zones affectées par le conflit en Éthiopie. Nous sommes profondément préoccupés par le harcèlement persistant mené par le gouvernement contre les défenseurs des droits humains, y compris au niveau judiciaire.
La tentative de l’Éthiopie de mettre fin au mandat toujours en cours de la Commission d’experts est sans précédent. Non seulement elle suggère que les États peuvent faire des manoeuvres politiques dans le but d’annuler les décisions du Conseil pour éviter un examen indépendant et s’affranchir de leur obligation de rendre des comptes, mais cela pourrait aussi créer un dangereux précédent s’agissant du suivi international et de l’impunité pour les violations des droits ailleurs dans le monde.
En novembre 2022, le gouvernement fédéral éthiopien et les autorités tigréennes ont signé un accord de cessation des hostilités. Bien que cet accord ait rétabli certaines dimensions de la vie civile, y compris en assouplissant certaines restrictions sur les services de base et l’aide humanitaire, la mise en place d’enquêtes indépendantes et efficaces pour poursuivre les crimes internationaux graves sera essentielle. Le travail et le mandat de la Commission d’experts viendraient compléter la cessation des hostilités, qui reconnaît le besoin de justice.
Les victimes de violations et leurs familles dans le nord de l’Éthiopie, mais aussi dans d’autres régions du pays, ont exprimé un manque de confiance dans les institutions de l’État et continuent
de demander que la communauté internationale prête davantage attention à leurs souffrances et agisse pour mettre fin à l’impunité. Les efforts de l’Éthiopie pour mettre fin au travail de la Commission d’experts réduiraient au silence l’espoir et la confiance qu’ont placé en elle les victimes, notamment celles qui ont déjà échangé avec la Commission dans l’espoir que leurs histoires soient racontées.
Face à la persistance des violations des droits humains, à l’absence d’enquêtes crédibles et à l’impossibilité d’établir les responsabilités au niveau national, le Conseil et ses membres devraient soutenir ceux et celles qui réclament justice et permettre à la Commission de poursuivre le mandat qui lui a été confié en 2021 : collecter et préserver les preuves des crimes graves qui ont été commis, et identifier les responsables pour rendre, dans la mesure du possible, ces informations accessibles et utilisables en vue de soutenir les efforts en cours et futurs en faveur de la justice.
Nous réitérons notre appel aux membres et observateurs du Conseil pour qu’ils bloquent les efforts de l’Éthiopie visant à mettre fin au mandat de la Commission d’experts, et pour qu’ils confirment leur soutien à la Commission et à la protection de l’intégrité du Conseil et de ses organes mandatés.
1. Africa Legal Aid (AFLA)
2. African Centre for Justice and Peace Studies (ACJPS) - Sudan
3. Amnesty International
4. Association pour la Défense des Droits de la Personne et des Libertés Publiques (ADL) - Rwanda
5. Association Mauritanienne des Droits de l'Homme (AMDH) – Mauritania
6. Association nigérienne pour la défense des droits de l'Homme (ANDDH) – Niger
7. Association Tchadienne pour la Promotion et Défense des Droits de l'Homme (ATPDH) – Chad
8. Association of Victims, Relatives and Friends of September 28, 2009 (AVIPA)
9. Atrocities Watch Africa (AWA)
10. Australia Tigray Alliance (ATA)
11. The Botswana Centre for Human Rights (DITSHWANELO) - Botswana
12. Center for Advancement of Rights and Democracy (CARD)
13. Center for Democracy and Development (CDD)- Mozambique 14. The Centre for Accountability and Rule of Law - Sierra Leone
15. CIVICUS: World Alliance for Citizen Participation 16. The Civil Society Human Rights Advocacy Platform of Liberia 17. Coalition for Justice and Accountability
18. Cooperation platform for Tigrayan-Norwegians
19. DefendDefenders (East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project)
20. Dekna Foundation
21. Ethiopian Human Rights Council (EHRCO) – Ethiopia
22. Ethiopian Canadians for Peace
23. Fondation Konrad Adenauer au Sénégal (FKA-Senegal)
24. Global Centre for the Responsibility to Protect
25. The Global Society of Tigray Scholars and Professionals (GSTS)
26. Groupe LOTUS - Democratic Republic of Congo
27. Health Professionals Network for Tigray 28. Human Rights Concern Eritrea
29. Human Rights Watch
30. International Commission of Jurists (Global)
31. International Federation for Human Rights (FIDH)
32. The International Refugee Rights Initiative (IRRI)
33. Irob Anina Civil Society (IACS)
34. Kenya Human Rights Commission (KHRI) - Kenya
35. Kenya Section of the International Commission of Jurists (Kenya)
36. Legal Action Worldwide (LAW)
37. Legacy Tigray
38. Les Mêmes Droits pour Tous (MDT) - Guinea
39. Ligue Burundaise des droits de l’Homme (Iteka) – Burundi
40. Ligue Centrafricaine des Droits de l'Homme (LCDH) - Central African Republic
41. Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH) – Djibouti
42. Ligue Ivoirienne des Droits de l'Homme (LIDHO) - Cote d’Ivoire
43. Ligue Sénégalaise des Droits humains (LSDH) - Sénégal
44. Observatoire congolais des droits de l'Homme (OCDH) – Congo
45. Observatoire des droits de l’Homme au Rwanda (ODHR) - Rwanda
46. Omna Tigray
47. Organisation Guinéenne de Défense des Droits de l’Homme et du Citoyen (OGDH) - Guinea
48. Organisation Nationale des Droits de l'Homme (ONDH) - Sénégal
49. Oromo Legacy Leadership & Advocacy Association (OLLAA)
50. Pan African Lawyers Association (PALU) 51. Parliamentarians for Global Action (PGA)
52. Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l'Homme (RADDHO) 53. Robert F. Kennedy Human Rights 54. Security & Justice for Tigrayans
55. South Africa Litigation Centre (SALC)
56. Sudanese Human Rights Monitor (SHRM) - Sudan
57. Tigray Action Committee
58. Tigray Advocacy and Development Association UK
59. Tigray Youth Network
60. Union of Tigrayans in Europe
61. United Tegaru Canada 62. Women’s Association for Victims’ Empowerment (WAVE)-Gambia 63. Zimbabwe Human Rights Association (ZimRights) – Zimbabwe